Osons l'inosable: le coco vin. Ce coq au vin vegan s'inscrit dans l'une de nos parodies culinaires*, visant à désacraliser le patrimoine gastronomique français que nous effeuillons lorsqu'il nous apparaît par trop cruel.
Le tour de magie reposera ici sur un type de haricot bien nommé, le coco (cultivé dans le Sud-Ouest, en Bretagne et ailleurs dans le monde), lequel, cuit et écrasé, sera additionné de farine de gluten de blé, puis cuit dans un bouillon, avant d'y refroidir pour acquérir une texture résistante. Coupé en cubes, ce «coco-seitan» se substituera ainsi à notre malheureux emblème national! Sautés à l'huile, les cubes mijoteront dans une sauce vineuse, bien relevée d'épices et d'aromatiques, avec de la carotte, des oignons et des champignons.
Notre «coq» au vin ne manquera pas d'allure sur une tablée festive: enrobé de sa garniture de légumes confits en sauce!
* Au même titre que nos cuisses de fenouil en persillade, notre plateau de fruits de mer et terre, notre petite friture des bords de l'eau et autres escargots à la bourguignonne...
Un peu d'histoire
Plat royal du dimanche et des grandes occasions, pour lesquels on sacrifiait le maître de la basse-cour, ou, plus souvent, une grosse poule, le coq au vin rappelle que l’Auvergne* fut, avant la crise du phylloxéra, l’une des deux plus grandes régions viticoles françaises (avec le Languedoc), et le chanturgue, l’un de ses vins les plus réputés (réduit, désormais, à quelques hectares). Partout où il se trouve des vignobles en Auvergne (au nord-ouest de Clermont, dans la région saint-pourcinoise et sur la vallée du Lot), ainsi que dans le Massif central (Rouergue, Limousin), se retrouve cette recette.
Laquelle est à base de découpes de coq, ou de poulet, sautées au beurre dans une cocotte sur toutes leurs faces aux côtés de lardons et de petits oignons, flambées au marc, avant de mijoter une heure et demie dans un vin corsé, avec un rien de sucre, de l'ail haché, un bouquet garni. Viennent s'ajouter des bâtonnets ou des rondelles de carotte et, en fin de cuisson, des champignons frais (cèpes), préalablement revenus au beurre. Le plat se sert bien chaud, nappé de sa sauce vineuse. Pour l'accompagner, des pâtes fraîches ou des pommes vapeur.
Toutefois, d'autres régions en revendiquent la paternité: coq au vin à la bourguignonne, dit encore coq au chambertin (Bourgogne), coq au vin jaune et aux morilles (Jura), coq au riesling (Alsace), coq au champagne (Champagne). Le Beaujolais, la Bresse mettent également à l'honneur cette spécialité emblématique à leur table.
* Une légende relie ce coq au vin à l'Auvergne: le chef gaulois Vercingétorix aurait fait envoyer à son assiégeant à Gergovie (52 av.J.-C), Jules César, un coq gaulois, symbole de de combativité, de vaillance et de fièrté. L'empereur romain aurait répliqué en invitant son adversaire à une cena (dîner romain) où il lui aurait fait servir son coq mijoté au vin. Peu après, Vercingétorix et ses 30 000 combattants arvernes infligeaient une défaite cuisante aux légions romaines. C'était avant le siège d'Alésia, qui devait se tenir l'été suivant...
Recette
Ingrédients
(pour 4 personnes)
Pour le “coq” (coco-seitan):
300 g de haricots coco secs rosés (ou blancs, à défaut)
250 g de farine de gluten
1 cuil. à soupe de miso noir (ou, à défaut, de concentré de tomate)
2 cuil. à soupe de de bouillon
1 cuil. à soupe d'huile
Paprika
Poivre
Sinon: reprendre notre seitan foncé.
Pour la garniture et la sauce:
12 petits oignons blancs ou blonds (de type grelot ou saucier)
250 g de champignons frais (champignons de Paris, cèpes, etc...)
2-3 carottes
100 g de tofu fumé
75 cl de vin rouge (vegan) ou 50 cl de vin rouge + 25 cl d'eau ou bouillon
Huile neutre
1 morceau de sucre
1 petit verre de marc ou de cognac (facultatif)
1 cuil. à soupe bombée de farine
2 gousses d'ail
1 bouquet garni
Sel
Poivre
Préparation
Faire le coco-seitan.
Faire tremper les haricots secs pendant une nuit entière.
Faire cuire les cocos secs dans une casserole d'eau bouillante jusqu'à ce qu'ils soient mous (compter près d' 1h15). Les égoutter, avant de les transférer dans un saladier. Les écraser avec un presse-purée en faisant en sorte de laisser le moins de peaux visibles.
Préparer un bouillon (2 litres d'eau + 2 cubes de bouillon de légumes). Verser un peu de bouillon, le miso (ou le concentré de tomate), l'huile, les épices en continuant d'écraser, afin d'obtenir une purée bien lisse. Saupoudrer de la farine de gluten. Mélanger à la fourchette, puis malaxer jusqu'à obtenir une pâte homogène.
Rouler celle-ci en boudin. Le détailler en tranches épaisses de 2-3 cm. Les tasser sur elles-mêmes pour ne pas laisser de fissures à l'intérieur. Plonger ces tranches dans le bouillon porté à petite ébullition pendant 25 minutes.
Laisser refroidir (2h) les tranches de seitan dans leur bouillon, afin qu'elles se raffermissent. NB: ce coco-seitan peut se préparer la veille ou l'avant-veille. Il suffit de le conserver dans son bouillon dans un récipient hermétique placé au frais.
Bien entendu, vous pouvez faire un simple seitan sans cocos (voir notre seitan foncé).
Peler les oignons et les faire rissoler 10 minutes dans une cocotte avec de l'huile en les remuant. Ajouter le tofu fumé détaillé en lardons et les faire revenir avec les oignons 5 minutes supplémentaires. Saupoudrer de la farine, bien remuer, en attendant que la farine roussisse. Ajouter les carottes, coupées en tronçons ou en rondelles épaisses. Verser ensuite le vin rouge et le sucre. Peler et hacher les gousses d'ail et les rajouter dans la cocotte avec le bouquet garni. Laisser cuire à petits frémissements pendant 30 minutes en couvrant, en remuant de temps à autre.
Pendant ce temps:
Sortir les tranches de coco-seitan de leur bouillon et les détailler en gros cubes ou en rectangles grossiers. Faire revenir ceux-ci sur toutes leurs faces dans une poêle bien huilée. Si vous voulez coller au plus près de la recette, vous pouvez les faire flamber au marc ou au cognac. Lorsque les morceaux sont dorés, les saler et poivrer. Réserver.
Nettoyer et émincer les champignons avant de les faire sauter 5 minutes dans une poêle avec de l'huile. Les égoutter.
Les 30 minutes de cuisson de la cocotte écoulés, ajouter les champignons et poursuivre la cuisson sur feu doux pendant 10 minutes. Ajouter enfin les morceaux de coco seitan, afin qui se réchauffent et s'imbibent de la sauce, durant 5 minutes.
Servir très chaud après avoir retiré le bouquet garni. Poser la cocotte au centre de la table. Répartir les morceaux de coco-seitan et les légumes dans les assiettes en arrosant de la sauce épaisse et onctueuse. Si vous le souhaitez, déposer un plat de pâtes, afin que chacun se serve selon son appétit.