A mi-chemin du gâteau et du flan, le millas est une préparation à base de farine de maïs, typique du grand Sud-Ouest et qui compte de nombreux fidèles, même si son côté quelque peu bourratif pourra déconcerter l'étranger de passage...
Aussi, pour remédier à sa lourdeur et le rendre plus digeste, certains pâtissiers ajoutent-ils de la farine de froment à celle de maïs. Avec un fond de pâte feuilletée ou brisée, on parlera davantage de flan au maïs… Il existe d'ailleurs quantité de millas, variant selon leurs ingrédients et la proportion de ceux-ci, leur forme (ronde, carrée, rectangulaire), leur épaisseur (selon la hauteur du moule utilisé: à gratin, à manqué, à tarte*), etc. Cependant, la base d'un millas authentique reste faite de farine de maïs. Celle-ci cuira avec du lait (végétal pour nous), des œufs (remplacés par de la crème végétale) et du sucre roux, ainsi qu'un parfum tel du cognac (si on est en Saintonge ou dans le Bordelais) ou de l'Armagnac (lorsqu'on est en Gascogne et plus bas). Des fruits peuvent venir se rajouter à même la pâte le «tirant» vers le clafoutis. Une fois glissé dans le moule choisi, l'appareil prendra sa texture particulière lors de sa cuisson au four.
Qu’il soit donc nature ou aux fruits, le millas se consomme généralement au dessert ou comme en-cas. Certains préfèrent le faire frire en morceaux à la poêle pour le doré et le craquant. D'autres l'accompagnent d'un coulis, d'une gelée de coing, d'une crème anglaise...
*Le type de moule que nous avons retenu, car ça rend l'épaisseur un peu moins «mastoc».
Un peu d'histoire
Le millas, encore très «tendance» dans les campagnes saintongeaises (on parle de millas charentais) comme ariégeoises (millas ariégeois), n'est pourtant pas leur seul apanage, puisqu'on retrouve ce gâteau paysan du Bordelais et des Landes aux Périgord et à la Gascogne, du Toulousain aux Pyrénées, via le Pays basque et les Corbières. Sur cette immense aire géographique, fleurissent les appellations et variantes: milla, millat, milloc, milloque ou milocre, (dans les Charentes), mihas et milhas (Gascogne, Languedoc), escauton ou escaouton, broye, flan au maïs, saligalais, garouillaud, etc... On le retrouve tantôt aux pruneaux, aux pommes ou autres fruits, prune, poire, abricots, pêche, cerise, framboise, etc...
Millas (milhas en occitan) vient de milh qui signifie «millet» . En effet, l’ancêtre de cette pâtisserie populaire, le milliassous ou millassou, ou encore millasson, était une bouillie de farine de millet consommée en Aquitaine depuis l’Antiquité. Au Moyen-Age, cette bouillie servait de pitance aux populations miséreuses et se donnait aussi aux chiens de chasse. Ce millet léguera son nom au millas bien que dans sa composition lui succédera le maïs: une plante américaine, appelée «blé de Turquie», introduite en Europe au XVIe siècle et dont la culture se développera particulièrement dans la région de Saintes, où elle donne naissance à plusieurs autres spécialités comme la cruchade. Le millas est alors une bouillie épaisse cuite à l'eau, pouvant être salée ou sucrée, puis frite à l'huile sous forme de galettes ou de crêpes épaisses. Il évoluera peu à peu vers cette version moderne sucrée (avec du lait, des œufs…) que nous lui connaissons.
*A noter que le gâteau magique, à la mode actuellement, n'est autre qu'un avatar de ces desserts anciens de type millas. L'appellation de « magique » résulte du fait que cette pâtisserie, obtenue à partir d’une préparation et d'une cuisson particulières, aboutit à trois textures différentes: un soubassement de génoise très aérée, un flan et une crème. D’autres pâtisseries entrent dans cette catégorie: le gâteau invisible (des tranches de pomme ou de poire très fines rendant difficile de deviner qu’il contient de la pâte); le gâteau impossible (une pâte de gâteau au chocolat, versée au fond d'un moule et recouverte d'un appareil à flan: à la cuisson, sous l’effet de la levure, les deux couches s’inverseront, la couche de gâteau au chocolat remontant à la surface); enfin, le gâteau à étages (une succession de couches de génoises colorées ou parfumées, assemblées à l’aide de crème ou un glaçage. Les étages du gâteau peuvent être tous de la même couleur, former un arc-en-ciel ou encore un damier).
Millas nature et son coulis de fruits rouges
Ingrédients
(pour 4-5 personnes)
180 g de farine de maïs (ou 150 g de farine de maïs + 30 g de farine de blé)
150 g de sucre roux
10 cl de crème végétale
75 cl de lait végétale (avoine, soja, amande…)
2 cuil. à soupe d'huile
½ sachet de levure chimique
2 à 3 cuil. à soupe de cognac ou d'armagnac (ou rhum, vanille, fleur d'oranger, etc)
100 à 150 g de fruits rouges + 1 à 2 cuil. à soupe de sucre
Préparation de recette
Placer la (ou les) farine(s) dans une casserole. Verser une partie du lait végétal froid et remuer avec un fouet. Commencer à chauffer en versant le reste du lait végétal et l'huile. Porter à ébullition le contenu de la casserole tout en remuant avec le fouet et, dès que ça épaissi un peu, saupoudrer du sucre roux, de la levure chimique, de la crème végétale et, enfin, du parfum choisi. Verser cet appareil dans un moule à manqué (environ 22 cm) ou un moule à tarte (24 à 26 cm) graissé avec le restant d'huile. Placer dans four à préchauffé à 200 °C pour environ 45 minutes. Vérifier la cuisson en plantant la lame d’un couteau qui doit ressortir sèche. Attendre que ça refroidisse un peu, avant de démouler.
Pour le coulis, faire chauffer les fruits rouges dans une casserole en les mélangeant avec le sucre et en remuant un peu, 5 à 10 minutes, selon que l'on veuille voir les fruits ou pas.
Découper des parts, nimber du coulis et servir tiède ou froid.
Le p'tit truc de Léna
Frédéric a adoré. Perso... le goût de la farine de maïs me dérange un peu. Je referais moitié farine de blé, moitié farine de maïs. Mais la texture reste intéressante et il y a un côté ludique avec les divers parfums possibles ou fruits à intégrer. Et ce dessert est parfait pour les intolérants au gluten (pour la levure, vous pouvez utiliser une levure sans gluten ou du bicarbonate de soude). On peut aussi faire sans levure.